Chroniques Sénégalaises - Jeudi 4 janvier 2018

Mi-décembre, Carlos et Paige m’ont proposé d’accompagner leur compagnie de théâtre au Sénégal. Durant une semaine, j’ai ainsi couvert le projet « Hann : voices of a bay » et suivi la compagnie Kaddu Yaraax de Dakar dans son initiation au jeu masqué.


Je rejoins Paris en TER. Carlos et Paige m’hébergent pour la nuit. Mon avion est le lendemain matin tôt, le leur dans l’après-midi. Ils arriveront à Dakar dans la soirée, moi dans la nuit. Un membre de Kaddu Yaraax, la compagnie de théâtre qui nous accueille, viendra nous récupérer.

 
 

Gare Montparnasse, métro ligne 4, sortie Strasbourg - Saint-Denis. La grande Arche n’a pas bougé. Les rabatteurs de salons de coiffure alpaguent la chalande africaine. Le vendeur de marrons grillés ventile son braséro. La pluie glaciale a fait fuir pigeons et prostituées mais la rue est restée fidèle : les grands sacs bariolés aux devantures des bazars, les odeurs de restaurants indiens, grecs, kurdes… la circulation en sens unique, le crado des trottoirs, les supérettes, le vendeur de fruits et légumes. La porte à code est ouverte. Je préviens de mon arrivée et croise Carlos dans l’escalier. Nous nous embrassons : il s’en va rejoindre un vieil ami. Paige m’accueille et m’offre à déjeuner. Elle me raconte les nouvelles de l’École, le réveillon passé avec le petit-fils de CHAPLIN, leur mariage en Espagne et leurs vacances canadiennes en canoë. J’évoque mon travail à l’usine, ma difficulté à écrire, mon participation heureuse à un festival de performances à Marseille en septembre. À l’instant, j’aimerai prendre Paige en photo au milieu du petit salon envahi de plantes vertes. Une lumière pâle lui tombe sur le visage. Un canari volette entre le miroir du bureau et la cage près de la fenêtre. Le déjeuner fini, nous avons encore quelques affaires à préparer. Paige doit vider des disques durs externes. De mon côté, je dois acheter une moustiquaire avant de voir A, une amie vénézuélienne. A. m’attend au fastfood près de la bouche de métro. L’odeur de friture est désagréable mais l’accès au wifi y est gratuit. Après avoir tenté un premier bar assez glauque, nous nous replions chez Jeanette. Une bière pour A, un chocolat chaud pour moi. Ses lèvres portent un joli rouge et son accent m’enchante. J’avais oublié son regard. A. a intégré un atelier d’écriture. Souvenirs de l’année passée, lectures, méditations… il est déjà l’heure de nous séparer.

 

Carlos, Paige et moi sommes invités à dîner chez P. en compagnie de sa fille M., d’une amie médecin et de la fille de celle-ci. Situé un peu plus haut dans la rue, l’appartement est distingué. Un cabinet de curiosité moderne et élégant. Le dîner est sympathique. Nous parlons du voyage à venir, de Bretagne, des migrants de Calais ou de Grande-Synthe. Après le repas, M. nous montre ses carnets de croquis, mélanges de tissus, dessins, peintures et de quelques mots griffonnés. De retour à l’appartement, je vais prendre une douche dans « la scène de crime » où de grandes toiles en plastique sont scotchées aux murs façon police scientifique.

Texte et photos : ©JRo, www.maiastrart.fr